Wednesday, September 12, 2018

 

The Future of Literature

Paul Valéry (1871-1945), "The Future of Literature," Collected Works, Vol XI: Occasions, tr. Roger Shattuck and Frederick Brown (Princeton: Princeton University Press, 1970), pp. 151-157 (at 151-152):
In short, there is nothing to prevent us from imagining that literature as we know it may become an art as archaic and as remote from everyday life as geomancy or heraldry or falconry is today. Perhaps in a century's time there will be only a few scholars left who can painfully decipher our written characters and, after long critical effort, reconstruct the state of mind of an age when written language was the principal means of preserving and transmitting thoughts and impressions.

En somme, il n'est pas interdit d'imaginer que la littérature puisse devenir à bref délai un art aussi inactuel et aussi éloigné de la vie et de la pratique que le sont pour nous l'art héraldique, la géomancie, ou la science de la chasse au faucon. Peut-être, dans un siècle, subsistera-t-il quelques professeurs qui déchiffreront péniblement nos caractères d'écriture, et qui restitueront, par un long travail de critique, l'état des esprits à l'époque où le langage écrit était le principal moyen de conservation et de transposition des pensées et des impressions.
Id. (at 153):
All literature is dominated by the nature of the audience to whom it is addressed. Every book is aimed at a reader who corresponds, in the writer's mind, to the idea he has of his contemporaries. In effect, there is a kind of law of supply and demand in literature. Readers of a given era get the quality of literature they want, in keeping with their culture and their powers of attention. Now, modern man is, in general, an execrable reader. The time has gone forever when a man could sit down with a book and enjoy spending the entire night by the light of a single candle searching out its guiding principle and mastering the work's innermost meaning and at the same time savoring the finest details of its form. And if readers have neither the time nor the patience to weigh and appreciate the words given them to read, authors will no longer choose their words with care and affection.

Toute littérature est dominée par les conditions du public auquel elle s'adresse. Tout livre vise un lecteur qui correspond, dans l'esprit de l'écrivain, à une idée qu'il se fait de ses contemporains. Il y a, en somme, en matière littéraire et artistique, une sorte de loi de l'offre et de la demande. Les lecteurs d'une époque donnée obtiennent toujours la qualité de littérature qu'ils désirent et qui est conforme à leur culture et à leur capacité d'attention. Or, l'homme modeme est, en général, un lecteur détestable. Le temps n'est plus où un texte pouvait être longuement médité, où des amateurs passaient leurs nuits, à la lueur d'une chandelle, à jouir minutieusement d'un livre dont ils essayaient de pénétrer toutes les intentions et d'approfondir la pensée directrice, en même temps qu'ils en goûtaient minutieusement la forme. Mais, si le lecteur n'a ni le temps ni la patience, de savourer, de peser les mots qu'on lui offre à lire, l'auteur cessera, de son côté, de les rechercher avec soin et de les peser lui-même en les écrivant.



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