Wednesday, February 01, 2012

 

The Depredations of Madame de Bérenger

Story of My Life: The Autobiography of George Sand: A Group Translation Edited by Thelma Jurgrau (Albany: State University of New York Press, 1991), pp. 565-566 (Part III, Chapter V):
Mme. de Bérenger stayed with us for six weeks, I believe, and left only when my grandmother was completely out of danger. But if this lady felt any distress of concern it did not show much, and I doubt that her heart was really touched. I honestly do not know why my grandmama, who had such great need for affection, had become so particularly attached to this haughty, imperious woman, in whom I have never been able to discover the least charm of mind or character.

She was very active and unable to stay still. She considered herself an expert at planning or improving the design of a garden or park, and no sooner had she seen our formal garden than she got it into her head to transform it into an English landscape—a preposterous idea—for on a flat terrain, without much of a view, and where trees are slow to grow, the best thing to do is conserve at all possible cost those which happen to be there; to plant for the future, not create clearings which show you the poverty of the surrounding lines of vision; and above all, especially when the road is right out front and very close to the house, to screen yourself as much possible behind walls or hedges, to preserve your privacy. But our hedges horrified Mme. de Bérenger, our square beds of flowers and vegetables, which seemed so beautiful and bright to me, she called a cabbage patch. Emerging from the first crisis of her illness, hardly had my grandmother regained her voice and hearing than her friend asked for permission to set the axe to the little woods and the pick and shovel to the paths. My grandmother was not fond of change, but her will was so weak at that moment (and besides, Mme. de Bérenger exerted such influence on her) that she gave her free rein.

So there we have that fine lady in action—she summons a score of workmen, and from her window directs the clearing operation, pruning here, destroying there, and always seeking a view which is nowhere to be found, for good reason: nothing can change the fact that, while the countryside is pretty enough from the second-storey window, when you are in the garden—on a level with the countryside—you see it flat and without panorama. To fulfil her desire, it would have been necessary to raise the earth in the garden by fifty feet. Each opening cut in the beds and tree clumps resulted only in our being able to enjoy the view of a vast, cultivated plain. The breach was growing larger; fine old trees that had no say in the matter were being cut down; Mme. de Bérenger drew patterns on paper, passed them from her window along a line of string to the workers, shouted after them, went upstairs, came downstairs, went back upstairs, lost her patience, and destroyed the little shade we had, without any profit in the exchange. At last she gave it up, thank God, for she could have made a clean sweep, but Deschartres pointed out to her that my grandmother, once she was well enough to go out and see for herself might perhaps miss her old hedges a great deal.

I was struck by the manner in which that lady spoke to the workmen. She was far too eminent to condescend to find out their names and deal with them as individuals. However, from her window she had dealings with each one in turn, and nothing in the world would have made her say "sir," or "my friend," or "old man," as they say in Berry, regardless of the age of the male you are addressing. She shouted to them at the top of her lungs, "Man Number Two!" "Listen, Man Number Four!" This caused gales of laughter among our quizzical peasants, but not one budged or turned his head in her direction. "By gum", they said to each other shrugging their shoulders, "we're all of us men, and we can't guess which one she's after—that woman."

It took some thirty years to undo the havoc wrought on our property by Mme. de Bérenger and to close off the openings for her "vistas."
The French, from George Sand, Histoire de Ma Vie (Paris, 1855), IV, 111-114:
Madame de Béranger resta, je crois, six semaines avec nous, et ne partit que lorsque ma grand'mère fut hors de tout danger. Mais cette dame, si elle eut du chagrin ou de l'inquiétude, ne le fit pas beaucoup paraître, et je doute qu'elle eût le coeur bien tendre. Je ne sais, en vérité, pourquoi ma bonne maman, qui avait un si grand besoin de tendresse, s'était particulièrement attachée à cette femme hautaine et impérieuse, en qui je n'ai jamais pu découvrir le moindre charme d'esprit ou de caractère.

Elle était fort active et ne pouvait rester en place. Elle se croyait très habile à lever ou à rectifier le plan d'un jardin ou d'un parc, et elle n'eut pas plutôt vu notre vieux jardin régulier, qu'elle se mit en tête de le transformer en paysage anglais; c'était une idée saugrenue, car, sur un terrain plat, ayant peu de vue, et où les arbres sont très lents à pousser, ce qu'il y a de mieux à faire, c'est de conserver précieusement ceux qui s'y trouvent, de planter pour l'avenir, de ne point ouvrir de clairières qui vous montrent la pauvreté des lignes environnantes; c'est surtout, lorsqu'on a la route en face et tout près de la maison, de se renfermer autant que possible derrière des murs ou des charmilles pour être chez soi. Mais nos charmilles faisaient horreur à madame de Béranger, nos carrés de fleurs et de légumes, qui me paraissaient si beaux et si riants, elle les traitait de jardin de curé. Ma grand'mère, au sortir de la première crise de son mal, avait à peine recouvré la voix et l'ouïe, que son amie lui demanda l'autorisation de mettre la cognée dans le petit bois et la pioche dans les allées. Ma grand'mère n'aimait pas le changement, mais elle avait la tête si faible en ce moment, et d'ailleurs madame de Béranger exerçait sur elle une telle domination, qu'elle lui donna pleins pouvoirs.

Voilà donc cette bonne dame à l'oeuvre; elle mande une vingtaine d'ouvriers, et de sa fenêtre dirigé l'abattage, élaguant ici, détruisant là, et cherchant toujours un point de vue qui ne se trouva jamais, parce que, si des fenêtres du premier étage de la maison la campagne est assez jolie, rien ne peut faire que, dans ce jardin, de plain-pied avec cette campagne, on ne la voie pas de niveau et sans étendue. Il aurait fallu exhausser de cinquante pieds le sol du jardin, et chaque ouverture pratiquée dans les massifs n'aboutissait qu'à nous faire jouir de la vue d'une grande plaine labourée. On élargissait la brèche, on abattait de bons vieux arbres qui n'en pouvaient mais; madame de Béranger traçait des lignes sur le papier, tendait de sa fenêtre des ficelles aux ouvriers, criait après eux, montait, descendait, retournait, s'impatientait et détruisait le peu d'ombrage que nous avions, sans nous faire rien gagner en échange. Enfin elle y renonça, Dieu merci, car elle eût pu faire table rase; mais Deschartres lui observa que ma grand'mère, dès qu'elle serait en état de sortir et de voir par ses yeux, regretterait peut-être beaucoup ses vieilles charmilles.

Je fus très frappée de la manière dont cette dame parlait aux ouvriers. Elle était beaucoup trop illustre pour daigner s'enquérir de leurs noms et pour les interpeller en particulier. Cependant elle avait affaire de sa fenêtre à chacun d'eux tour à tour, et pour rien au monde elle ne leur eût dit: «Monsieur, ou mon ami, ou mon vieux,» comme on dit, en Berry, quel que soit l'âge de l'être masculin auquel on s'adresse. Elle leur criait donc à tue-tête: «L'homme numéro 2! Ecoutez, l'homme numéro 4!» Cela faisait grandement rire nos paysans narquois, et aucun ne se dérangeait ni né tournait la tête de son côté. «Pardi!» se disaient-ils les uns aux autres en levant les épaules, «nous sommes bien tous des hommes, et nous ne pouvons pas deviner à qui elle en a, la femme

Il a fallu une trentaine d'années pour faire disparaître le dégât causé chez nous par madame de Béranger, et pour refermer les brèches de ses points de vue.
Hat tip: Eric Thomson.

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