Wednesday, April 05, 2017

 

Monologue of Crepitus

Gustave Flaubert (1821-1880), The Temptation of St. Anthony (tr. Kitty Mrosovsky; stage directions italicized):
                                      CREPITUS

makes himself heard.

I too was honoured once. Libations were made to me. I was a god!

An Athenian would greet me as a lucky omen, while a devout Roman would curse me with raised fists, and the pontiff of Egypt, abstaining from beans, quailed at my voice and paled at my odour.

When the army vinegar ran down unshaven beards and people tucked into acorns, peas and raw onions, and the goat was chopped up and cooked in shepherds' rancid butter, no one was bothered — never mind your neighbour. Solid foods made for ringing digestions. In the sunlight of the countryside, men relieved themselves at leisure.

So I got by without scandal, like the other natural necessities, like Mena the virgins' affliction and like Rumina, who protects the the nurse's breasts swollen with bluish veins. I was happy. I raised a laugh! And gladly distended on my account, a guest would let all his gaiety out through the apertures of his body.

I had times to boast of. Good Aristophanes put me on the stage, and the Emperor Claudius Drusus had me sitting at his table. In the patricians' laticlaves I moved majestically! Gold pots echoed under me like tympani — and when, full of eels and truffles and paté, the master's intestine noisily disgorged itself, the attentive universe learnt that Caesar had dined!

But now I'm confined to the populace — and people object to my very name!

And Crepitus moves off with a groan.



                                      CRÉPITUS

d'une voix flûtée.

Moi aussi l'on m'honora jadis. On me faisait des libations. Je fus un dieu.

L'Athénien me saluait comme un heureux présage de fortune, tandis que le Romain dévot me maudissait, les poings crispés, et que le pontife d'Égypte, s'abstenant de fèves, tremblait à ma voix et pâlissait à mon odeur.

Quand le vinaigre militaire coulait sur les barbes non rasées, que l'on se régalait de glands, de ciboules et d'oignons crus, et que le bouc en morceaux cuisait dans le beurre rance des pasteurs, sans souci du voisin, personne alors ne se gênait. Les nourritures solides faisaient les digestions retentissantes; au soleil de la campagne, les hommes se soulageaient avec lenteur.

Ainsi, je passais sans scandale, comme tous les autres besoins de la vie, comme Mena tourment des vierges, et la douce Rumina qui protège le sein de la nourrice gonflé de veines bleuâtres. J'étais joyeux! Je faisais rire! et, se dilatant d'aise à cause de moi, le convive exhalait sa gaieté par les ouvertures de son corps.

J'ai eu mes jours d'orgueil! Le bon Aristophane me promena sur la scène et l'empereur Claudius Drusus me fit asseoir à sa table. Dans les laticlaves des patriciens j'ai circulé majestueusement. Les vases d'or, comme des tympanons, résonnaient sous moi, et quand plein de murènes, de truffes et de pâtés, l'intestin du maître se dégorgeait avec fracas, l'univers attentif apprenait que César avait dîné.

Mais à présent on rougit de moi. On me dissimule avec effort. Je suis confiné dans la populace, et l’on se récrie même à mon nom!

Et Crépitus s'éloigne en poussant un gémissement.
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